Dès la fin de l’année 2021, ceux qui produisaient ou concevaient des jeux vidéo, des expériences de réalité virtuelle (RV), augmentée (RA) ou mixte (RM), des jumeaux numériques, ou encore des dispositifs et solutions qui ressemblaient peu ou prou à un monde virtuel en 3D, ont soudainement revendiqué produire des métavers ou participer à leur construction (cf. “Les alter ego du Métavers”). Le PDG de Reddit allant même jusqu'à affirmer que son site web communautaire “était déjà un métavers avant l’heure mais avec une interface utilisateur volontairement minimaliste”.
L’intérêt, pour ces fournisseurs de solutions, n’est pas tant la conception du ou d’une partie du Métavers, que d’être inclus dans le brouhaha médiatique qui entoure ce dernier. Car, contrairement aux mondes virtuels du début des années 2010 (Second Life, Habbo Hotel, Poptropica, Club Penguin, etc.), le Métaverse, dans sa version 2021 est incarné par Meta (cf. “Les huit éléments fondamentaux”), l’une des multinationales les plus importantes au monde. Le positionnement de cette entreprise vis-à-vis du Métavers a donc eu un effet d’entraînement immédiat et phénoménal auprès d’un grand nombre d’acteurs du numérique (acteurs économiques, universitaires, institutionnels, etc.). D’aucuns y voient également une manière pour un grand nombre d’entreprises de présenter ce qu’elles font déjà sous un nouvel angle, plus “futuriste qu’internet” et qui “suscite l’enthousiasme des investisseurs et des médias”.
Un énième “nouvel eldorado économique”
Cet opportunisme répond à l’attrait de la manne économique que représente potentiellement le Métavers, qui fut rapidement alimentée par de nombreuses études économiques, plus ou moins sérieuses, venant entretenir la perspective d’un “nouvel eldorado économique”. C’est ainsi que certaines études misent sur une “opportunité de marché estimée à plus de 1 000 milliards de dollars en termes de revenus annuels”, quand d’autressurenchérissent en estimant que le “Metaverse pourrait représenter entre 8 000 et 13 000 milliards de dollars d'ici à 2030, avec un nombre total d'utilisateurs [...] avoisinant les cinq milliards”. Derrière ces chiffres existent surtout des méthodes de calcul et des périmètres d’analyse très différents, qui appellent à une très grande vigilance dès lors qu’ils sont cités, voire manipulés. En définitive, qu’il y ait une croissance économique du réseau internet dans les prochaines années, une augmentation des ventes de casque de réalité virtuelle/augmentée/mixte, et de plus en plus d’expériences immersives soutenant le développement d’une économie spécifique, est une forte probabilité. Mais la comparaison de chiffres, à partir du moment où celle-ci n’est pas relative aux mêmes objets, n’a que peu d’intérêt. Certaines études allant même jusqu’à considérer qu’il est “impossible de prédire, a priori, tous les domaines dans lesquels les technologies du métavers seront utilisées, le degré d'adoption du métavers, les innovations qui seront développées sur la base du métavers, et tous les impacts économiques associés. De même, il n'est pas possible de quantifier tous les effets de déplacement du métavers pour en déduire l'impact économique net. En d'autres termes, il n'y a pas de ‘métavers’ à mesurer aujourd'hui”.
Tester et acculturer le plus tôt possible
Au-delà des discours promotionnels qui veulent nous faire croire le contraire, il n’y a que très rarement une réflexion approfondie des entreprises sur la valeur ajoutée des cas d’usages qu’elles testent dans le Métavers. Ces dernières souhaitent avant tout anticiper de possibles disruptions, ne pas passer “à côté” du train métaversique si celui-ci devait arriver à bon port. Elles sont là pour tester, pour expérimenter et pour apprendre.